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clone ?

L'avènement du surhomme

« Aucune réflexion n'est plus importante que celle qui porte sur la transmissibilité des aptitudes et des caractères. » (Nietzsche).
Or, d'après Charles Richet, il semblerait que « la civilisation aboutit à la dégradation de l'espèce ».
« Outre que la civilisation ne constitue pas par elle-même un facteur de progrès biologique, elle peut, indirectement, devenir un facteur de régression. » (Jean Rostand, L'homme, 1962)

Selon Nietzsche, la conscience est l'instinct dominant, celui que l'homme souverain s'est forgé à force d'expérience, de volonté et de maîtrise. « Les instincts gouvernent notre activité consciente et la « conscience » ne s'oppose jamais à l'instinct d'une manière définitive. Élever un animal qui puisse promettre, n'est-ce pas là cette tâche paradoxale que la nature s'est donnée à propos de l'homme ? »
Ne serions-nous pas aujourd'hui au seuil d'une époque extra-morale?
« Le dépassement de la morale par elle-même, tel est le mot pour désigner ce long travail secret qui était réservé aux consciences les plus fines, les plus probes, aux consciences qui sont les plus vibrantes pierres de touche de l'âme. » (cf. Par delà le Bien et le Mal, II, Le libre esprit § 32).
La science contemporaine permet une biologie manipulée qui nous donne les meilleurs spécimen possibles rationnellement. Il y a une parenté entre le psychisme et l'organisme en tant que matière, cela se constate dans les fonctions génétiques particulières à chaque gène, et même à chaque séquence génétique. Certaines tares génétiques sont des déficiences mentales ou psychiques. L'évolution devrait se faire davantage dans le mental et le psychisme humain que par manipulation génétique, pense-t-on.

Pourtant la science progresse et des hommes sont en mesure de changer l'espèce humaine :
« En dépit de toutes les mises en gardes, et contre l'avis des comités d'éthique du monde entier, des généticiens de plus en plus nombreux, la plupart américains, envisagent de modifier les cellules germinales pour créer des lignées d'hommes transgéniques. Le tabou est brisé. Verra-t-on apparaître une caste de surhommes, dotés de gènes décuplant leur puissance intellectuelle, leur force physique, leur résistance aux maladies, au stress, ou capables de vivre plus vieux tout en restant jeunes ? Ils seront issus des classes les plus riches puisque toute cette thérapie coûtera cher. » (Science & Vie, dossier Génétique (1)
Reprenons un article de Luc Ferry paru dans Le Point du 15 décembre 1999, intitulé :
An 2000 ; l'avènement du surhomme ?
Face aux biotechnologies, l'humanisme est-il «dépassé»?
« Certains évoquent la possibilité de manipulations génétiques qui permettraient d'opérer une «sélection prénatale», en vue d'une « planification explicite des caractéristiques » de l'espèce humaine en vue d'établir « sa domestication sur des bases nouvelles ». Un philosophe allemand a développé le thème suivant : nous serions à l'aube d'une ère nouvelle dont les fondements serait résolument « post-littéraires, donc post-humanistes », lors d'une conférence intitulée : Règles sur la parc humain. (Le penseur sur scène, Le matérialisme de Nietzsche, Peter Sloterdijk, éd. Bourgeois 1989) résume E. Alliez (2)

« Cela s'inscrit dans le sillage de la critique, désormais classique, adressée par Nietzsche aux "prêtres et aux professeurs" chargés d'inculquer les valeurs morales traditionnelles : sous prétexte d'idéaux élevés, ils n'auraient en réalité d'autre but que de domestiquer les instincts sauvages et les pulsions de révolte, persuadés qu'il existe un rapport essentiel entre la lecture, la station assise et l'apaisement. Ironie toute nietzschéenne, selon laquelle le thème latent de l'humanisme est le désensauvagement de l'homme et sa thèse explicite l'idée que de bonnes lectures adoucissent les mœurs », note Luc Ferry (3), qui poursuit :
« Et faut-il s'attaquer à la question de la régulation de l'espèce humaine par d'autres voies que celle de l'éducation traditionnelle ? Sur ce terrain, la tradition humaniste progressiste est confrontée à un débat non seulement avec ses adversaires, mais aussi en son propre sein. La thèse de la « post-humanité » est défendue, pour l'essentiel, par des adversaires de l'humanisme. Elle a été exprimée récemment par deux hommes. L'un est identifié à la droite conservatrice américaine et, à grand renfort de moyens, a été rendu célèbre, en 1989, par son article sur « La fin de l'histoire », initialement paru dans The National Interest ; il s'agit de Francis Fukuyama. Voir l'article de P. Viveret qui, compte tenu de l'éloge des inégalités auquel il se livre en permanence, pressent également que notre auteur envisagerait sans trop d'états d'âme un monde où des sous-hommes seraient au service de surhommes. Le second, Peter Sloterdijk, vient plutôt de la gauche radicale allemande, et il se trouve à l'origine d'une forte polémique, depuis sa conférence donnée en juillet 1999 lors d'un colloque sur Martin Heidegger et Emmanuel Levinas, qui s'est transformée, dans les colonnes de l'hebdomadaire Die Zeit, en « affaire Sloterdijk ».
On peut en effet concevoir deux formes de thérapie génétique. La première est la thérapie génique somatique. Dans ce cas, le traitement ne concerne qu'une fraction des cellules d'un individu sans modification du patrimoine génétique et germinal. C'est cette méthode qui est actuellement dans l'impasse. Les vecteurs prévus pour effectuer le transfert de la séquence d'ADN vers la cellule cible, - on misait sur les adénovirus et les rétrovirus -, ne correspondent pas aux prévisions escomptées (NB*). À l'inverse, la thérapie germinale provoquerait une modification du patrimoine génétique de l'individu à naître qui serait transmissible à sa descendance, donc une nouvelle race: l'homo transgenicus. « Les implications eugéniques et la possibilité de modification irréversible du patrimoine génétique humain rendent cette approche moralement inacceptable, voire dangereuse », disent prudemment nos savants de l'INSERM.
Ce sont les vieux démons de l'eugénisme qui resurgissent aujourd'hui. Il y aurait sans doute de bonnes raisons à essayer de réguler l'espèce pour améliorer la santé physique et mentale des nouvelles générations et surtout pour réduire considérablement le nombre de naissances génétiquement "malvenues". La facture est lourde, dans nos sociétés, pour la prise en charge des enfants malformés et débiles profonds. Si par l'éducation, on pouvait faire de la prévention, sachant tout sur ce qui induit des mutations pathologiques, mais notre société mercantile s'y refuse. Alors, on investit et on s'ingénie à vouloir réparer l'irréparable. On arrive à décrypter la carte du génome humain mais ce n'est pas dit qu'on va réussir à réparer les gènes défectueux. Ni qu'on le fera, si cela s'avère trop risqué ou trop coûteux.
Connaissant l'avidité des hommes, leur volonté de pouvoir, n'y a-t-il pas d'autres dangers pour les individus ?

Le Surhomme de Nietzsche annoncé correspond-il davantage au mutant supra-mental annoncé par Shri Aurobindo, avec l'acquisition d'une conscience cosmique ? (Lire La Genèse du Surhomme, Saptrem, 1971). Ici-bas, les Rosicruciens y travaillent déjà.

An 2000 : Les articles dans la Presse ; livres et dossiers consacrés à Nietzsche pour célébrer l'année anniversaire de sa mort.
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note1 Philippe Chambon, Science & Vie, dossier Génétique, février 1999. Certains ont même pensé à cloner le Christ à partir d'une goutte de sang du saint suaire.
note2 Eric ALLIEZ, Magazine Littéraire N° 383, dossier Nietzsche, janvier
note3 Luc FERRY, écrivain philosophe, Le Point N° 1421, décembre 1999
NB* A l'Institut Pasteur, on table sur le vaccin du virus du SIDA pour sauver des vies (en le rendant inoffensif par manipulation génétique ; cf. article sur la thérapie génique, sur le webduweb).

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