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Origines historiques méconnues du christianisme
«Qui pourrait dire le vrai nom de l'antéchrist ?»
(Nietzsche, dans une postface intitulée : Essai d'une critique
de soi-même)
La recherche
de la vérité historique est encore à l'ordre
du jour. Nietzsche avait fait son enquête, il donne une analyse
très pertinente sur l'inventeur du christianisme :
Le premier chrétien
Le monde entier croit encore au talent d'auteur du « Saint-Esprit
», ou subit encore les contrecoups de cette croyance: si l'on
ouvre la Bible c'est pour « s'édifier », pour trouver
à sa propre misère, grande ou petite, un mot de consolation,
- bref, on s'y cherche et on s'y trouve soi-même. Qu'elle rapporte
aussi l'histoire d'une âme des plus ambitieuses et des plus importunes,
d'un esprit aussi plein de superstition que d'astuce, l'histoire de
l'apôtre Paul, - qui sait cela en dehors de quelques savants ?
Pourtant, sans cette histoire singulière, sans les troubles et
les orages d'un tel esprit, d'une telle âme, il n'y aurait pas
de monde chrétien; à peine aurions-nous entendu parler
d'une petite secte juive dont le maître mourut en croix. Il est
vrai que, si l'on avait compris à temps cette histoire, si l'on
avait lu, réellement lu, les écrits de saint Paul, non
pas comme on lit les révélations du « Saint-Esprit
», mais avec la droiture d'un esprit libre et primesautier, sans
songer à toute notre détresse personnelle -pendant quinze
cents ans il n'y eut pas de pareils lecteurs -, il y a longtemps que
c'en serait fait du christianisme: tant il est vrai que ces pages du
Pascal juif mettent à nu les origines du christianisme, tout
comme les pages du Pascal français nous dévoilent sa destinée
et la raison de son issue fatale. Si le vaisseau du christianisme a
jeté par-dessus bord un bon parti de son lest judaïque,
s'il est entré, s'il a pu entrer dans les eaux du paganisme,
- c'est à l'histoire d'un seul homme qu'il le doit, de cette
nature tourmentée, digne de pitié, de cet homme désagréable
aux autres et à lui-même. Il souffrait d'une idée
fixe, ou plutôt d'une question fixe, toujours présente
et toujours brûlante: savoir ce qu'il en était de la loi
juive ? de l'accomplissement de cette loi ? Dans sa jeunesse, il avait
voulu y satisfaire lui-même, avide de cette suprême distinction
que les Juifs savaient imaginer - ce peuple qui a poussé l'imagination
du sublime moral plus haut que tout autre peuple et qui a seul réuni
la création d'un Dieu saint avec l'idée du péché
considéré comme manquement à cette sainteté.
Saint Paul était devenu à la fois le défenseur
fanatique et le garde d'honneur de ce Dieu et de sa loi. Sans cesse
en lutte et aux aguets contre les transgresseurs de cette loi et contre
ceux qui la mettaient en doute, il était dur et impitoyable pour
eux et disposé à les punir de la façon la plus
rigoureuse. Et voici qu'il fit l'expérience sur sa propre personne
qu'un homme tel que lui - violent, sensuel, mélancolique, comme
il l'était, raffinant la haine - ne pouvait pas accomplir cette
loi; bien plus, et ce qu'il lui parut le plus étrange: Il s'aperçut
que son ambition effrénée était continuellement
provoquée à l'enfreindre et qu'il fallait céder
à cet aiguillon. Etait-ce bien « l'inclination charnelle
» qui, toujours, le forçait à transgresser la loi
? N'était-ce pas plutôt, comme il s'en douta plus tard,
derrière cette inclination, la loi elle-même, qui se trouvait
ainsi, forcément, inaccomplissable, poussant sans cesse à
l'infraction, avec un charme irrésistible ? Mais en ce temps-là
il ne possédait pas encore cette échappatoire. Peut-être
avait-il sur la conscience, ainsi qu'il le fait entrevoir, la haine,
le crime, la sorcellerie, l'idolâtrie, la luxure, l'ivrognerie,
le plaisir des banquets d'orgie - et quoi qu'il puisse faire pour soulager
cette conscience et, plus encore, son désir de domination, par
l'extrême fanatisme qu'il mettait dans la défense et la
vénération de la loi, il avait des moments où il
se disait : « Tout est en vain ! Il n'est pas possible de vaincre
le tourment de la loi inaccomplie. » Luther a dû éprouver
un sentiment analogue lorsqu'il voulut devenir, dans son cloître,
l'homme de l'idéal ecclésiastique, et de même que
Luther - qui se mit un jour à haïr et l'idéal ecclésiastique,
et le pape, et ses saints, et tout le clergé, avec une haine
d'autant plus mortelle qu'il ne pouvait se l'avouer - de même
il en advint de saint Paul. La loi devint la croix où il se sentait
cloué: comme il la haïssait ! Comme il lui en voulait !
Comme il se mit à fureter de tous côtés pour trouver
un moyen propre à l'anéantir - et non plus à l'accomplir
dans sa propre personne ! Mais voici qu'enfin le jour se fit tout à
coup dans son esprit, grâce à une vision, comme il ne pouvait
en être autrement chez cet épileptique, il est frappé
d'une pensée salvatrice: lui, le fougueux zélateur de
la loi qui, au fond de son âme, en était fatigué
jusqu'à la mort, voit apparaître, sur une route solitaire,
le Christ avec un rayonnement divin sur le visage, et saint Paul entend
ces paroles: « Pourquoi me persécutes-tu ? » Or,
en substance, voici ce qui s'était passé : son esprit
était devenu clair tout à coup, il s'était dit
: « L'absurdité, c'est précisément de persécuter
ce Jésus-Christ ! Le voilà l'expédient que je cherchais,
voilà la vengeance complète, là et nulle part ailleurs
j'ai entre les mains le destructeur de la loi! » Le malade à
l'orgueil tourmenté se sent du même coup revenir à
la santé, le désespoir moral s'est dissipé car
la morale elle-même s'est dissipée, anéantie - c'est-à-dire
accomplie, là-haut, sur la croix ! Jusqu'à présent
cette mort ignominieuse lui avait tenu lieu d'argument principal contre
cette « messianité » dont parlaient les adhérents
de la nouvelle doctrine: mais qu'adviendrait-il si elle avait été
nécessaire pour abolir la loi ? - Les conséquences monstrueuses
de cette idée subite, de cette solution de l'énigme,
tourbillonnent devant ses yeux, et il devient tout à coup le
plus heureux des hommes, - la destinée des Juifs, non, la destinée
de l'humanité tout entière lui semble liée à
cette seconde d'illumination soudaine, il tient l'idée des idées,
la clef des clefs, la lumière des lumières; autour de
lui gravite désormais l'histoire! Dès lors il est l'apôtre
de l'anéantissement de la loi! Mourir au mal - cela veut dire
aussi mourir à la loi. Quand même il serait possible de
pécher encore, ce ne serait du moins pas contre la loi ; «
je suis en dehors de la loi, » dit-il, et il ajoute: « Si
je voulais maintenant revenir à la loi et m'y soumettre, je rendrais
le Christ complice du péché » ; car la loi n'existait
que pour engendrer toujours le péché, comme un sang corrompu
fait sourdre la maladie ; Dieu n'aurait jamais pu décider la
mort du Christ si l'accomplissement de la loi avait été
possible sans cette mort ; désormais non seulement tous les péchés
nous sont remis, mais le péché lui-même est aboli
; désormais la loi est morte, désormais est mort l'esprit
charnel où elle habitait - ou bien du moins cet esprit est sans
cesse en train de mourir, de tomber en décomposition. Quelques
jours à vivre encore au sein de cette décomposition! -
tel est le sort du chrétien, avant qu'uni avec le sort du Christ
il ne ressuscite avec le Christ à la gloire divine, désormais
« fils de Dieu» comme le Christ. - Ici l'ivresse de saint
Paul est à son comble et avec elle l'importunité de son
âme, - l'idée de l'union avec le Christ lui a fait perdre
toute pudeur, toute mesure, toute soumission, et l'indomptable volonté
de domination se révèle dans un enivrement anticipant
la gloire divine. - Tel fut le premier chrétien, l'inventeur
du christianisme ! Avant lui, il n'y avait que quelques sectaires juifs.
(Nietzsche, Aurore, § 68).
LE FONDATEUR DE LA RELIGION CHRÉTIENNE
C'est donc dans le Nouveau
Testament que nous trouvons les indices qui indiquent ce qu'il
s'est réellement passé dans les temps apostoliques. Notre
glose répond aux questions dont jamais personne
n'avait donné de réponse satisfaisante :
- Pourquoi l'Église chrétienne, d'origine juive, a rompu
avec le judaļsme ? Quand ? Et qui en est le responsable ?
- Ą lire les épītres, il semble que les apôtres étaient
confrontés aux Antéchrists, aux faux-prophètes annoncés.
Bien qu'ils ne soient pas désignés par leurs noms, nous
avons pu les démasquer. Qui sont ces faux-prophètes, les
fameux « Antéchrist » présents aux temps apostoliques ?
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