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Rendons à Nietzsche ce qui lui appartient
«La conscience n'est qu'un réseau de communications
entre les hommes; c'est en cette seule qualité qu'elle a été
forcée de se développer: l'homme qui vivait solitaire,
en bête de proie, aurait pu s'en passer. Si nos actions, pensées,
sentiments et mouvements parviennent - du moins en partie - à
la surface de notre conscience, c'est le résultat d'une terrible
nécessité qui a longtemps dominé l'homme, le plus
menacé des animaux: il avait besoin de secours et de protection,
il avait besoin de son semblable, il était obligé de savoir
dire ce besoin, de savoir se rendre intelligible; et pour tout cela,
en premier lieu, il fallait qu'il eût une "conscience",
qu'il "sût" lui-même ce qui lui manquait, qu'il
"sût" ce qu'il sentait, qu'il sût ce qu'il pensait.
Car comme toute créature vivante; l'homme pense constamment,
mais il l'ignore. La pensée qui devient consciente ne représente
que la partie la plus infime, disons la plus superficielle, la plus
mauvaise, de tout ce qu'il pense : car il n'y a que cette pensée
qui s'exprime en paroles, c'est-à-dire en signes d'échanges,
ce qui révèle l'origine même de la conscience.»
(Nietzsche)
« Derrière tes pensées et tes sentiments
se tient le corps et dans le corps se tient le soi qui t'est propre
: la terra incognita... Le soi qui t'est propre dans le corps
veut en faire quelque-chose...» (Nietzsche)
Ces textes montrent que Nietzsche
est un précurseur dans la psychologie des profondeurs et dans la
psychanalyse, bien avant Freud, contrairement à l'idée reçue.
C'est en fonction de cela qu'il prétend qu'avant lui la psychologie
n'existait pas (Ecce Homo). Les analyses psychologiques de Nietzsche
sur la primauté des instincts, des affects et des désirs
sur la volonté, sur le refoulement, et sur le complexe de culpabilité,
furent rapportées à Sigmund Freud par Lou Andreas
Salomé. En 1920, Freud a repris aussi
son idée selon laquelle l'agressivité relève d'un
instinct primaire inextricable. "Le père de la psychanalyse"
s'est créé une légende en affirmant qu'il obtenait
des guérisons avec sa méthode mais ses fantasmagories ont
fait leur temps et on sait qu'il a menti. Nietzsche a développé
sa thèse de la volonté de pouvoir comme instinct
de vie ; il rejette la foi liée aux sentiments moraux et la traite
de "névrose religieuse" (Par delà bien et mal,
§ 47), formulation reprise par Freud :
"La religion est la névrose
obsessionnelle de l'humanité".
Le désintéressement
ne serait qu'un moyen pour séduire et se rendre aimable. Point
de vue de Nietzsche :
L'ascétisme, le renoncement et la chasteté sont contre-nature
(instinct de mort retourné contre soi).
Le psychiatre C.G. Jung,
disciple de Freud au début, s'est démarqué de lui
au sujet de ses théories sexuelles. Jung est parmi les premiers
hommes de science à s'être lancé dans l'analyse de
l'inconscient (personnel ou collectif), cet océan qui baigne l'île
de notre moi. Il est la mer d'où provient toute vie. C'est le royaume
de la vie génétique et des comportements instinctifs. Le
monde animal, de l'être unicellulaire jusqu'à la complexité
de l'être conscient (ou à demi conscient) que nous sommes,
est entièrement dominé par l'inconscient qui se manifeste
individuellement et collectivement, dans la vie de tous les jours. Mais
il y a aussi dans l'inconscient personnel, la persona, le rôle
ou le masque qu'on se donne en société.
C.
G. Jung semble donc avoir repris les idées de Nietzsche (Dialectique
du Moi et de l'Inconscient, essai sur la réalisation de soi
par le "processus d'individuation"). C'est le chemin vers le
surhumain enseigné par Nietzsche !
! !
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